La mission archéologique française de Bash Tapa est un projet de fouilles créé en 2013 en accord avec la DGA de la région autonome du Kurdistan irakien et le Ministère français des affaires étrangères.
Il vise à documenter et à étudier la culture matérielle des périodes préclassiques de la région d’Erbil qui fut, jusqu’en 2011 pour des raisons politiques, une quasi terra incognita archéologique. Pourtant, la documentation provenant des régions limitrophes mieux connues signalait son importance, tant pour l’apparition des premières cultures urbaines des IVe et IIIe millénaires que pour l’histoire de l’empire assyrien, de sa période de formation dans la seconde moitié du IIe millénaire jusqu’à sa fin vers 612 av. J.-C.
Fig. 1 – Carte de localisation de Bash Tapa (Kurdistan irakien).
Fig. 2 – Vue du site de Bash Tapa.
La mission est un des programmes de l’équipe « Mondes Mésopotamiens » de l’UMR 7192 du CNRS et participe à un autre de ses programmes, celui de TEXTELSEM, un programme de géographie historique sur la Haute-Mésopotamie.
Le site de Bash Tapa a été sélectionné suite à une prospection réalisée dans la région d’Erbil en mai 2012, grâce à un financement de l’UMR 7192 et au soutien de la DGA d’Erbil et l’Institut d’Archéologie de l’université de Salahaddin (Erbil). Ce tell, d’environ 4 ha, et de 25 m de haut, est localisé au cœur de l’Assyrie, à 34,5 km au sud d’Erbil, dans une riche plaine agricole irriguée par un important système de wadis qui alimentent le Petit Zab, un affluent majeur du Tigre. L’environnement de cette plaine est actuellement particulièrement favorable tant à l’agriculture qu’à l’élevage et devait donc représenter une situation tout aussi idéale aux époques plus anciennes confortée par son insertion dans les différents systèmes d’échange et de contrôle. De telles conditions expliquent sans doute que Bash Tapa a connu de longues phases d’occupation pendant lesquelles il fut à plusieurs reprises intégré dans les ensembles étatiques qui se sont succédé au Proche-Orient ancien.
Dans le cadre d’un quadriennal (2013-2016), financé par le Ministère des Affaires étrangères et placée sous la direction de L. Marti (UMR 7192) avec comme co-responsables K. Shawaly (UMR 7192) et C. Nicolle (UMR 7192), une première mission de fouille s’est déroulée en septembre 2013. Elle a permis l’identification de différentes périodes d’occupation tant sur le tell que dans ses alentours immédiats.
Fig. 3 – Les zones couvertes par la prospection.
Une prospection de surface (fig. 3) a révélé que les principales phases d’occupation du tell couvraient la période Ninivite V (début du IIIe millénaire) jusqu’à l’époque néo-assyrienne (1ère moitié du Ier millénaire). Des occupations ultérieures moins importantes sont toutefois identifiées dans certaines parties du tell (période hellénistique) ou dans ses environs immédiats (période parthe). Cette première vision demande à être complétée par d’autres moyens d’investigations (par ex. prospection géomagnétique) car une étude géomorphologique préliminaire du secteur de Bash Tapa montre que la divagation fréquente des deux wadis qui coulent de part et d’autre du tell a eu un impact important sur la conservation et le recouvrement des anciennes occupations.
Durant la campagne de 2013, deux sondages stratigraphiques ont été ouverts dans la pente sud du tell pour préciser les résultats de la prospection de surface.
Dans le premier sondage implanté à la base du tell (fig. 4), l’occupation la plus ancienne découverte pour le moment date de la période Ninivite V. Il s’agit d’une agglomération déjà importante sans doute construite sur des terrasses en briques crues et peut-être entourée d’une enceinte en pisé.
Fig. 4 – Vue du sondage à la base du tell lors de son ouverture.
Au sommet du tell, le second sondage (fig. 5) a livré une partie d’un grand bâtiment de l’époque médio-assyrienne (XIVe siècle – fin du IIe millénaire av. n. è.) dans lequel du matériel céramique a été retrouvé in situ (jarres de stockage, coupes, assiettes, etc.).
Fig. 5 – Vue d’ensemble du sondage du niveau assyrien.
La découverte conjointe de quelques tablettes cunéiformes (ex. fig. 6) datant du règne de Tukultî-Ninurta Ier (fin du XIIIe siècle av. n. è.) dans un contexte à préciser, semble indiquer que le site était alors un centre administratif local gérant les terroirs agricoles environnants.